Comme je l’ai souligné dans mes précédents articles, la performance sur marathon est fortement corrélée non seulement au volume d’entraînement kilométrique hebdomadaire (Casado & al., 2019 ; Muniz-Pumares & al., 2024), mais aussi à une approche pyramidale de l’entraînement privilégiant le travail au seuil et un pourcentage élevé d’efforts à l’allure spécifique marathon.
Cependant, avant toute chose, il est indispensable de définir avec précision l’intensité de course à la fois pour cibler un stress métabolique précis à l’entraînement et pour optimiser la performance le jour du marathon. Une mauvaise estimation de l’intensité peut conduire à une stratégie de course déséquilibrée : partir trop vite sur les premiers kilomètres entraîne souvent une dégradation de la durabilité et un ralentissement de plus de 25 % au cours de la deuxième moitié de la course.
Pour éviter ce piège, il convient de s’appuyer sur des données concrètes, recueillies à partir de différentes distances. Dans cette optique, la vitesse maximale aérobie (VMA) — qui ne peut être maintenue que 3 à 11 minutes — n’est pas suffisamment pertinente pour estimer la capacité d’un athlète à soutenir une intensité stable durant plus de deux heures. En revanche, l’analyse des performances sur des distances allant de 3 km à 21,1 km permet de déterminer la vitesse critique, un indicateur crucial pour ajuster ses intensités d’entraînement, modéliser ses performances et affiner sa stratégie de course.
1. Comment utiliser la vitesse critique pour le marathon ?
Le concept de vitesse critique (CS) s’inspire des travaux sur la relation puissance–temps (power–time relationship), initialement développés en physiologie de l’exercice (Monod & Scherrer, 1965 ; Poole et al., 2016, notamment). La CS se calcule en modélisant la relation distance–temps sur plusieurs efforts de référence.
Avec l’allongement de la durée de l’effort, l’intensité soutenable diminue progressivement ; c’est en calculant la pente de cette relation entre l’intensité et le temps que l’on peut définir la vitesse critique (CS).
En théorie, la CS est définie comme une intensité stable pouvant être maintenue indéfiniment.
En pratique, cette intensité peut être soutenue entre 40 minutes et 1 heure selon le niveau de « durabilité » de l’athlète. De plus, la valeur de la CS dépend des performances de référence utilisées : si l’on s’appuie sur des durées courtes (entre 3 et 15 minutes), la CS calculée sera plus élevée qu’en recourant à des durées plus longues (entre 5 et 20 minutes).
Il existe donc des valeurs de CS différentes selon la durée des performances choisies pour la calculer. N’oubliez pas que la CS est, avant tout, le résultat d’un calcul mathématique.