Train Low, Race High : moduler votre nutrition à l’entraînement pour performer en compétition
Lors d’une épreuve d’ultra-endurance (>7 heures d’effort), la performance dépend d’un équilibre entre l’oxydation des graisses et des glucides, où la stratégie nutritionnelle joue un rôle déterminant. Cette dernière permet non seulement de préserver les réserves de glycogène musculaire grâce à un apport en glucides pendant l’effort, mais aussi d’optimiser l’oxydation des graisses, contribuant ainsi à une meilleure performance.
Bien entendu, cette approche diffère de la stratégie nutritionnelle HighCarb, qui prône l’idée qu’un apport massif de glucides pendant l’exercice (de 90 à 120 g/h, voire plus de 140 g/h selon certaines recommandations récentes) améliorerait systématiquement la performance. Pourtant, il n’est pas possible de recommander un dosage universel : chaque athlète possède un taux individuel d’oxydation des glucides, ce qui implique que la tolérance digestive (GIS) dépend étroitement du volume de glucides ingérés, mais surtout oxydés, ainsi que de l’intensité de l’exercice. Cela souligne l’intérêt d’individualiser les apports glucidiques pour éviter les troubles gastro-intestinaux. Adapter la quantité et la qualité des glucides consommés pendant l’effort est donc essentiel pour limiter le risque de surcharge digestive, qui peut non seulement provoquer des désordres gastro-intestinaux, mais également compromettre la performance d’endurance.
Ainsi, si la performance en ultra-endurance repose sur un équilibre entre l’oxydation des glucides et des graisses, il est pertinent d’adopter une stratégie nutritionnelle à l’entraînement visant à développer une capacité métabolique hybride. Cela consiste à maintenir la faculté d’absorber des glucides à un taux moyen de 60 g/h (à ajuster en fonction de l’absorption individuelle) tout en maximisant l’oxydation des graisses pendant l’exercice.
Pour entraîner l’organisme à utiliser efficacement les graisses comme substrat énergétique, il est crucial de s’exposer régulièrement à des entraînements prolongés (>3h), qui épuisent les réserves de glycogène musculaire. En effet, même sans suivre un régime pauvre en glucides, les athlètes peuvent maintenir des taux élevés d’oxydation des graisses (>1 g/min) à condition de pratiquer un entraînement régulier et prolongé en réduisant l’apport énergétique lors de certaines séances.
Les études récentes montrent que sans exposition régulière à des entraînements prolongés et/ou à une disponibilité énergétique réduite, la capacité d’oxydation des graisses ne s’active pas spontanément le jour de la compétition. Pour optimiser cette adaptation, il est essentiel de créer un stress métabolique spécifique lors de la préparation, en combinant volume d’entraînement élevé et apports glucidiques contrôlés.
Train Low, High Carb - la stratégie nutritionnelle pour créer des athlètes hybrides
Cette stratégie repose sur l’idée d’entraîner l’organisme à utiliser efficacement les graisses comme substrat énergétique tout en préservant sa capacité à utiliser les glucides lors des compétitions. Elle consiste à s’entraîner, lors de certaines séances, avec une disponibilité glucidique volontairement faible (faibles réserves de glycogène musculaire), puis à consommer des glucides lors des séances clés et pendant les compétitions pour optimiser la performance.
Il est essentiel de bien distinguer la stratégie nutritionnelle mise en place à l’entraînement de celle utilisée en compétition, d’où le concept « Train Low, Race High » :
À l’entraînement : l’objectif est de maximiser la signalisation cellulaire et d’accentuer les adaptations métaboliques en manipulant l’apport énergétique durant l’exercice.
En compétition : on vise à maximiser l’apport énergétique pour optimiser la performance, tout en minimisant les risques de troubles gastro-intestinaux.
Concrètement, cela revient à périodiser l’apport en glucides pendant la préparation. Certaines sessions d’entraînement sont volontairement accomplies avec de faibles réserves glucidiques, tandis que les séances clés et les compétitions bénéficient d’un apport optimal en glucides. Ce concept est né de la recherche d’une alternative au régime cétogène prolongé (LCHF – low-carb high-fat), contraignant et pouvant exposer les athlètes à un risque de syndrome RED-S(Relative Energy Deficiency in Sport), associé à un déficit énergétique chronique susceptible d’affecter la performance et la santé.
La stratégie Train Low, Race High se distingue ainsi d’un régime strict low-carb en limitant la restriction glucidique à des périodes d’entraînement ciblées, ce qui permet d’amplifier les signaux d’adaptation métabolique sans compromettre l’apport énergétique indispensable à la compétition.
Plusieurs méthodes permettent d’appliquer cette approche :
Réaliser deux entraînements rapprochés sans reconstitution des réserves glucidiques intermédiaires (« doubles sessions », la seconde étant « low »).
S’entraîner à jeun le matin après une nuit sans apport glucidique.
Réduire volontairement les apports glucidiques lors de longues séances d’endurance (≈3h).
Adopter le protocole « sleep low, train low » : séance intense en soirée pour vider les réserves, nuit sans apport glucidique, puis entraînement à jeun au réveil.
Les athlètes appliquant la stratégie Train Low, Race High réalisent typiquement plusieurs séances par semaine dans ces conditions, tandis que d’autres continuent à s’entraîner en conservant des apports glucidiques constants. Au final, l’apport total quotidien en glucides peut rester identique entre les deux stratégies, mais il est réparti différemment afin de créer des fenêtres métaboliques favorables (par exemple en s’abstenant de manger après une séance intensive pour prolonger la période en bas glycogène jusqu’à la session suivante).
Les athlètes en stratégie « Train Low, Race High » vont typiquement réaliser plusieurs séances par semaine dans de telles conditions, tandis que les athlètes utilisant un régime normo-glucidique vont consommer des glucides normalement autour de leurs séances. Au final, l’apport glucidique total quotidien peut être identique entre les deux stratégies, mais réparti différemment afin de créer des fenêtres à bas glycogène (p. ex. ne pas manger après un entraînement intensif avant la séance du lendemain) permettant de renforcer certaines voies de signalisation cellulaire.
Etude de cas
Je vais vous présenter la stratégie « Train Low, Race High » mise en place depuis quelques mois dans le cadre de la préparation de l’Ironman Nice avec un jeune triathlète (-24 ans) que j’accompagne depuis bientôt deux ans. Vous découvrirez les entraînements et les stratégies nutritionnelles appliquées, qui ont permis d’optimiser son métabolisme d’oxydation des graisses à l’exercice et d’observer une progression significative en course.